Trophée Jules Verne

Franck Cammas à la conquête de son premier Trophée Jules Verne

Quelle impression ressentez-vous depuis votre départ de Cadix en avril dernier ?

« Il est difficile de savoir si nous avons progressé sans avoir de repère mais nous avons découvert Groupama 3 de jour en jour. Aller sur 24 heures aussi vite est une bonne façon de connaître un bateau ! Je suis maintenant assez serein pour la suite et particulièrement pour le tour du monde : on a tiré sur le bateau comme nous ne le ferons pas lors du Trophée Jules Verne. Il y a moins d'incertitudes et plus de connaissances. Tant pour le bateau que pour les hommes : je partirai en confiance. »

Comment pensez-vous que le trimaran va se comporter dans les mers du Sud ?

« Nous avons pu analyser le comportement de Groupama 3 dans pas mal de conditions avec les records de cette saison et la seule interrogation concerne le Grand Sud avec une grosse mer de l'arrière : comment ça va se passer quand les trois étraves vont enfourner ? Le Sud est très spécial et très différent de ce qu'on peut vivre en Atlantique car les pentes des vagues peuvent être très abruptes. Mais jusqu'à présent, nous avons toujours été maîtres de la situation. »

Quels sont les atouts de Groupama 3 sur le Trophée Jules Verne ?

« Vis-à-vis de la concurrence, Groupama 3 est plus bas sur l'eau mais quand on voit d'autres bateaux qui ont fait le tour du globe en solitaire comme ceux d'Ellen MacArthur ou de Francis Joyon, on sait qu'on pourra faire le Trophée : il faudra juste savoir quand lever le pied... Les points forts de Groupama 3 sont sa relative légèreté qui facilite la descente sous gennaker (Atlantique Nord), sa conception trimaran qui le favorise dans les phases de transition (Pot au Noir), sa capacité à faire du près (remontée le long du Brésil) et ses performances au vent de travers grâce à sa largeur (moyennes élevées sur 24 heures). Il nous faudra donc gagner quelques heures voire quelques jours en descendant et en remontant l'Atlantique... »

Temps à battre : 50 jours, 16 heures, 20 minutes et 4 secondes

Le 20 avril 1993, Bruno Peyron, à la tête de son équipe, boucle le premier tour du monde légendaire en 79 jours, 6 heures, 15 minutes et 56 secondes et devient ainsi le premier détenteur du "Trophée Jules Verne".

En vingt trois ans, il y a eu treize tentatives pour battre ce record dont cinq seulement porteront leurs fruits : 1994, 1997, 2002, 2004 et 2005.

En 2005, Bruno Peyron a mis la barre très haute : 50 jours, 16 heures, 20 minutes et 4 secondes... C'est l'objectif de l'année et le défi à relever par Franck et ses hommes.





Groupama 3

En décembre 2004, forts de leur réussite sportive et humaine, Groupama et Franck Cammas lancent la construction d'un maxi trimaran de 105 pieds, Groupama 3, véritable défi technologique et sportif.

Groupama 3 est le voilier le plus large au monde doté d'un rapport poids / puissance supérieur à celui des maxi multicoques existants.

Inspiré des multicoques ORMA actuels et particulièrement de son "petit frère" Groupama 2, Groupama 3 sera le premier multicoque équipé de foils à s'aventurer dans les mers du sud.

" Nous avons choisi un bateau moins long mais plus maniable car dans le programme de records, il ya certes le Trophée Jules Verne, mais aussi un certain nombre d'autres records et un jour il y aura aussi des régates. Il est clair que dans ce cas là, l'option d'avoir un bateau assez polyvalent était plus intéressant."
Vincent Lauriot Pévost

Groupama 2

Baptisé le 26 juin 2004 et dernier-né des multicoques 60', Groupama 2 a fait son entrée en compétition deux mois plus tard, à l'occasion du Grand Prix de Fécamp.

18 courses, 15 podiums, 13 victoires dont 11 en Grand Prix : depuis sa mise à l'eau, Groupama 2 fait parler la poudre !

A la barre de son plan Van Peteghem - Lauriot Prévost, Franck Cammas a disputé 83 manches pour en remporter 61, soit un taux de réussite de plus de 73 %.

Après six jours de mer, Francis Joyon dispose de plus d’une journée d’avance sur le record d’Ellen MacArthur. Mais les choses se sont compliquées avec la traversée du Pot au noir.

«Je suis contente que tu sois en mer. Un record est là pour être battu !» Pas revancharde pour un sou, Ellen MacArthur lâchait mercredi quelques mots d’encouragement à Francis Joyon au détour d’une vacation en compagnie du skipper d’IDEC. Comme tout le monde, la détentrice du record a pu constater l’impressionnante allure du trimaran depuis son départ de Brest il y a un peu moins d’une semaine. Après six jours au large, Joyon a déjà dépassé le Cap Vert et pointe désormais à hauteur du Brésil. Mercredi soir, alors qu’il maintenait une cadence de plus de 20 nœuds par heure, le maxi catamaran disposait d’une sacrée avance sur le record de MacArthur pointée virtuellement à 658 milles derrière. Soit l’équivalent, grosso modo, d’une grosse journée de navigation. Ravi d’avoir choisi la bonne fenêtre météo pour s’élancer, le navigateur avait le moral gonflé à bloc : «Je suis extrêmement content du bateau qui remplit son cahier des charges et fait même mieux encore ! Les vitesses atteintes par le bateau sont plus élevées que celles que nous avions établies en théorie et c’est plutôt sympa.»

Le pc fait des siennes

Mis à part quelques craquements et grincements à surveiller sur IDEC et quelques petites bricoles de routine à réaliser, Francis Joyon n’a pour le moment pas eu à déplorer de gros incident. «Le problème le plus stupide qui m’est arrivé concerne mon écran d’ordinateur qui s’est affiché à l’envers durant 24 heures…», confie-t-il amusé par radio. La robustesse d’IDEC n’empêche toutefois pas l’accumulation de la fatigue des heures de sommeil en retard car depuis le départ «le rythme ressemble plus à celui d’une transat qu’à celui d’un tour du monde.»

L’incertitude du Pot au noir

Le navigateur trinitain a toutefois vu s’amonceler en moins d’une demi-journée les premiers nuages de sa folle tentative avec les prémices de ce qu’il appelle «l’inconnue du Pot au noir». La vitesse d’IDEC s’est nettement détériorée en l’espace de quelques heures pour passer de 22 à 15, et même en dessous des 10 nœuds de moyenne. A l’approche de l’équateur, Joyon s’inquiète des conditions qui l’attendent dans cet espace très instable ou des violents grains peuvent succéder à de trop grands calmes. Dans son entretien avec Ellen MacArthur mercredi, Joyon s’était d’ailleurs empressé de demander à la navigatrice comment s’était déroulé son passage il y a un peu moins de trois ans. Et l’Anglaise s’était visiblement bien dépatouillée de cette zone à risques. «J’avais eu un temps plutôt stable sans gros grain qui m’avait permis de passer dans la journée la partie difficile», avouait la Reine Ellen. Une réponse qui ne sonne pas forcément comme une bonne nouvelle pour Joyon, bien conscient de jouer gros dans les 48 prochaines heures. Une mauvaise passe pourrait «entièrement remettre en cause cette belle avance», rappelait avec prudence le Breton.

Le premier est connu pour sa cuisine et sa subtilité dans l'art des associations. Le second est avec Franck Cammas le récent vainqueur de la Transat Jacques Vabre et affiche son éternelle bonne humeur sur les pontons depuis de nombreuses années.

Amis de longue date, Philippe Rochat, trois étoiles au Guide Michelin, et son compatriote, le navigateur Stève Ravussin, se retrouvent régulièrement pour partager les plaisirs de la table et de la convivialité. Entre ces deux hommes l'admiration et le respect réciproques sont de mise et Rochat ne cache pas le plaisir qu'il a à être le témoin privilégié des plus grands défis : « Je suis admiratif à l'égard de tous ces grands aventuriers. Il y a cinq ou six ans, Mike Horn m'avait demandé de lui faire quelques plats pour son grand voyage dans le Nord. Ensuite ses amis comme Stève sont venus me demander de leur donner quelques conseils. J'ai eu à coeur de mettre au point ces plats, mais simplement par amitié. J'ai déjà fait quelque chose pour Franck Cammas à l'occasion de la Route du Rhum. Cette fois c'est pour un défi de cinquante jours et il m'a demandé s'il était possible de les lyophiliser. Avec mon équipe, nous avons joué le jeu et le résultat a de quoi nous satisfaire. Il y a eu quelques petites subtilités à modifier mais je suis très étonné de ce à quoi nous sommes arrivés. »

La grande cuisine... lyophilisée !

Parler de plats lyophilisés à un marin c'est certes évoquer son quotidien en mer sur une durée plus ou moins longue, mais c'est surtout se heurter aux réflexions sur la fadeur des préparations et cette désagréable impression que tout a le même goût. Rien à voir avec les pépites gustatives préparées par le chef helvète pour le tour du monde de Groupama 3. Odeur, saveur et enchantement des papilles tout y est. Conditionnés en sachets lyophilisés par les soins d'une entreprise spécialisée, les recettes de Philippe Rochat n'ont rien perdu de leur grande qualité. Au passage de l'Equateur, dans le grand sud ou au Cap Horn, les dix marins du maxi-trimaran pourront ainsi se régaler d'une cuisine trois étoiles avec au menu des sauces hautes en couleurs pour agrémenter pâtes et riz qui constitueront une base essentielle de leur alimentation : « Pour arriver au produit avec lequel les marins partiront, nous sommes entrés en contact avec une société spécialisée dans les produits lyophilisés afin de savoir quels ingrédients nous pouvions y mettre. Nous avons élaboré les différents mets qu'ils auront à bord en suivant les consignes, mais il s'agit vraiment de la cuisine comme on la fait dans notre restaurant. Nous sommes arrivés à plusieurs préparations sous forme de sauces : au curry, à la tomate, aux champignons, aux pimientos (plus relevée). Ils partiront également avec trois plats cuisinés qu'ils n'auront qu'à réchauffer pour les premiers jours ».

Préparées spécialement pour le Trophée Jules Verne de Groupama 3, ces sauces lyophilisées ne seront pas commercialisées et resteront le plaisir unique de dix marins à la conquête d'un record rendu célèbre par Phileas Fogg, et le clin d'oeil à ceux-ci d'un des plus grands chefs du moment... Simplement par amitié !

Voile - T. du monde - Joyon a accéléré

Profitant actuellement de conditions favorables, Francis Joyon est passé jeudi sous la barre des 8000 milles à parcourir pour boucler son tour du monde en solitaire. Le skipper d'IDEC, qui possède une avance colossale d'environ 3200 milles sur le record de la Britannique Ellen MacArthur (71 jours, 15 heures, 18 minutes), mais aussi sur Thomas Coville, lui aussi lancé dans cette aventure, devrait franchir le Cap Horn samedi matin selon un communiqué diffusé sur son site internet.

Après avoir été confronté mardi et mercredi à des vents de plus de 50 noeuds et des creux de 6 à 7 mètres, Joyon a «relancé sa machine avec près de 20 noeuds de vitesse moyenne. Si ces conditions favorables pouvaient de nouveau se réunir, il en terminerait avec une très dure traversée du Pacifique dès samedi matin», précise le communiqué.

De son côté, Coville, qui est en avance sur le record de MacArthur mais très en retard sur Joyon, «a passé la nuit (de mercredi à jeudi) au large des côtes brésiliennes», explique un communiqué publié sur son site internet, qui précise que «les heures à venir s'annoncent difficiles. Il doit contourner par l'Ouest l'anticyclone de Sainte-Hélène qui lui barre actuellement la route vers le Cap de Bonne-Espérance».

L'equipe.fr

BREST (AFP) - Le navigateur Francis Joyon, qui a repris dimanche à Ellen MacArthur le record du tour du monde en solitaire, qu'il avait été le premier à décrocher en 2004, entre dans la légende de la voile grâce à un temps de 57 j, 13 h, 34 min et 6 sec, 14 jours de moins que l'Anglaise.

Parti le 23 novembre sur un maxi-trimaran de trente mètres de long, Francis Joyon a franchi la ligne d'arrivée dans le goulet de Brest, dimanche à 00H39, et a été accueilli quelques heures plus tard par une foule d'un millier de personnes au port de commerce.

"57 jours, je n'osais pas y croire", a commenté le navigateur, qui estimait au départ ses chances de battre le record à "une sur trois ou quatre", donnant initialement comme objectif la barre de passer en deçà des 70 jours.

Comme depuis le début de son aventure, le navigateur a salué dimanche les qualités de "son super bateau", un trimaran dessiné par Nigel Irens et Benoît Cabaret, plus long que le Castorama d'Ellen MacArthur, qui lui a permis de "glisser à grande vitesse à travers les océans comme un véliplanchiste".

Par rapport à son premier tour du monde en 2004, le navigateur dit avoir gagné par moment "50% de vitesse en plus".

Après son départ fulgurant dans des conditions météo très favorables, une des clés du succès selon lui, le navigateur a dû cependant rester vigilant jusqu'au bout, craignant "la casse" d'un trimaran poussé à ses limites.

"La dernière nuit, j'ai failli heurter un cargo et j'ai eu un bateau de pêche en travers de la route", a-t-il raconté à son arrivée, visiblement fatigué.

Le moment le plus difficile "physiquement" et "carrément dangereux" a eu lieu il y a une dizaine de jours, lorsqu'il a dû réparer son mât, en haut duquel il est monté à quatre reprises. Il a alors envisagé de rejoindre l'île la plus proche, à 400 milles, pour aller réparer dans des conditions moins périlleuses, mais n'a pas songé à abandonner, a-t-il confié dimanche après-midi.

Grâce à son talent de bricoleur, "c'est un marin complet, capable de tout faire à bord de son bateau", dit de lui Jean-Luc Van den Heede, détenteur du record du tour du monde "à l'envers". La réparation a tenu jusqu'à l'arrivée, et lui a seulement fait perdre deux jours.

Le navigateur, peu friand d'honneurs et des médias, et dont son sponsor, loue "la simplicité", a tout de même classé son exploit "au top" de tout ce qu'il avait pu accomplir jusqu'à présent.

La Britannique Ellen MacArthur, venue à sa rencontre sur la ligne d'arrivée dans la nuit de samedi à dimanche, a jugé qu'il "n'y avait personne de mieux à qui passer ce record". Elle qui avait bouclé le tour du monde en un peu plus de 71 jours n'exclut pas de se mettre en chasse pour reprendre ce record, alors que Francis Joyon a montré que, sans avarie, la barre des 55 jours pouvait être atteinte.

Francis Joyon, qui s'est dit fatigué et n'aspirait dimanche matin qu'à retrouver plus d'une ou deux heures de sommeil par nuit, est également le premier marin à partir sur une telle aventure sans moteur.

Il n'a pu compter pendant ses deux mois de traversée que sur un éolienne, des panneaux solaires et une pile à combustible, dont il est très satisfait. "C'est une petite pierre apportée à la protection de l'océan", a-t-il lancé.

Alors qu'on lui demandait quel était le secret de son exploit, Francis Joyon, qui s'est dit peut-être mystique à cause de la fatigue, a expliqué que "le secret, c'est aussi de respecter les océans". "La mer a décidé de me laisser passer, parfois il faut laisser les éléments décider."