Rien ne semble pouvoir arrêter la formidable mécanique auvergnate ces temps-ci. Clermont vient de coller près de 150 points en trois matchs. Son effectif est impressionnant, son jeu l'est plus encore. L'ASM pourra-t-elle enfin aller au bout de son rêve cette saison?
Clermont donne le tournis. Depuis quelques semaines, l'ASMCA affole les compteurs. Lors des cinq dernières journées, les Auvergnats ont claqué 28 essais et inscrit 213 points, soit un peu plus de 42 en moyenne par rencontre. Au secours... Certes, des effets conjoncturels, comme l'impasse parisienne à Marcel-Michelin voilà deux semaines, peuvent expliquer en partie cet embrasement offensif. Reste que le match produit à Montpellier (victoire 56-17 et huit essais à la clé dont trois lors des 10 premières minutes) le week-end dernier est de ceux qui inquiètent la concurrence.
Au point que, pour certains, si Toulouse reste leader du Top 14 à ce jour, Clermont est peut-être devenu le véritable favori pour la quête du Brennus. Pierre Mignoni s'empresse de tempérer les ardeurs: "Je refuse de dire que nous avons marqué les esprits. Car l'an passé on avait déjà dit la même chose et on n'avait rien gagné" , assène le demi de mêlée. Ce qui n'est pas tout à fait vrai, puisque l'ASM avait remporté le Challenge européen. En finale du championnat, il ne lui avait manqué que trois minutes pour dompter le Stade Français et décrocher le gros bout de bois.
Vitesse à tous les étages
Si Mignoni, pas du genre à s'emballer, est dans son rôle, il semble toutefois que Clermont ait franchi un cap par rapport à l'an dernier, pour atteindre une forme de plénitude dans son jeu en ce début de printemps. Ce qui frappe le plus dans cette équipe, c'est son extraordinaire vitesse d'exécution. Celle du ballon, quand elle en a la possession et, bien sûr, celle de ses joueurs. "Il est vrai que nous avons dans le groupe beaucoup de joueurs qui vont très vite", admet Vern Cotter dans Midi Olympique, vendredi.
Les trois-quarts en sont la preuve la plus évidente, mais ils ne sont pas le seul. Même les deuxième ligne, à l'image de Loïc Jacquet, donnent de la vitesse au jeu. Clermont propose aujourd'hui une équation quasi insoluble. Olivier Diomandé, capitaine de Montpellier, a pu le mesurer. Il résume: "Ils n'ont aucune faille. Devant, ils sont très perforants, ils vous font mal à l'impact. Ils sont rudes et vous usent jusqu'à la moelle avant d'ouvrir des brèches pour les trois-quarts. Leurs arrières sont aussi monstrueux, surtout Nalaga, qui est un véritable extra-terrestre."
Quelque chose des Blacks
Ce jeu frappé du sceau de la vitesse permet d'établir aujourd'hui un véritable label Clermont. Comme il y a un style toulousain. Cette identité propre doit beaucoup à la patte de Vern Cotter. Le technicien néo-zélandais a su transposer en Auvergne ce qu'il avait contribué à construire chez les Crusaders, dont il fut l'entraineur-adjoint. Il y a quelque chose des All Blacks dans ce rugby total à la fois intelligent, physique, rapide et ambitieux. La qualité individuelle des joueurs fait le reste. Là aussi, l'ASM est plutôt bien lotie, y compris quantitativement...
Pour autant, rien ne dit que les Jaunards vont continuer de tout écraser sur leur passage. A l'heure des phases finales, quand les défenses se resserrent, que l'aspect mental prend une toute autre dimension, pourront-ils alors exploiter pleinement leur potentiel, comme en ce moment? Après tout, comme le rappelle Mignoni, Clermont n'a effectivement encore rien gagné. Ce club a trop souvent effleuré le paradis sans pouvoir l'étreindre pour rêver avant l'heure. Mais l'ASM a rarement possédé autant d'arguments qu'en ce printemps 2008...
Rugbyrama - Laurent VERGNE -