Thibaut Privat n'est pas le plus connu des joueurs de Clermont. Il est pourtant l'un des leaders de l'ASM, l'un des capitaines du groupe. Il est aussi un joueur exemplaire, et réalise une excellente saison sous le maillot jaune et bleu. Avant de retrouver le Stade Toulousain samedi pour le choc de la 18e journée, l'ancien Biterrois dresse un regard lucide sur la folle série de son club, et prévient que la saison est loin d'être terminée. Comme beaucoup de ses coéquipiers en Auvergne, il clame aussi et surtout son rêve: être champion de France.
«Thibaut Privat, Clermont a signé contre Bourgoin sa huitième victoire consécutive, en montrant une nouvelle fois un niveau de jeu impressionnant. Comment vivez-vous cette folle série ?
Nous sommes dans une bonne dynamique, mais il faut savoir garder les pieds sur terre, parce qu'il nous reste encore beaucoup de match, et dès le week-end prochain, on a un très gros rendez-vous à Toulouse. Donc il ne faut pas s'enflammer et croire que... Mais c'est vrai que c'est toujours bien d'être dans une bonne série, on recherche en permanence ce genre de dynamique.
Contre Bourgoin la rencontre a paru facile, et les Berjalliens eux-mêmes ont avoué une grosse différence entre les deux équipes. Sentez-vous aussi une supériorité flagrante ?
Le match n'a pas été facile vous savez, et tout ne fut pas parfait. C'est vrai que vu de l'extérieur, ça peut paraître facile, mais nous avons une autocritique à faire sur les choses qui n'ont pas marché. Mais c'est vrai qu'on bosse aussi beaucoup dans la semaine, que ce soit physiquement ou tactiquement, et je crois que ça fait partie de la solution pour réussir.
L'ASM monte en puissance depuis le début de saison. Quel est votre état d'esprit en ce moment ?
Tout s'enchaîne bien et les victoires sont là pour le prouver. Mais il ne faut pas croire que le championnat est fini. Ce qui compte, ce sont les phases finales, les matches couperets, il n'y a que ceux-là qui comptent et dont on se rappelle. Faire une bonne saison, ce n'est pas un fin en soi. C'est bien, c'est qu'on recherche, mais ce n'est pas un fin en soi. Il faut viser le titre.
L'engouement populaire est énorme à Clermont. Ce public est aussi un atout supplémentaire...
Avec les réultats qu'il y a, l'attente est là. Ce peuple attend le Bouclier depuis tellement d'années. Et puis on est passés tellement près l'année dernière (NDLR: défaite sur le fil en finale contre le Stade Français). Les gens ici sont tellement supporters qu'ils savent nous soutenir. Ils sont simplement heureux, sans nous mettre une mauvaise pression. Ils sont vraiment extraordinaires.
Le club semble avoir franchi un vrai palier avec l'arrivée de Vern Cotter il y a deux saisons. Quelle est la méthode du Néo-Zélandais ?
Depuis deux ans, on monte en puissance, on a un jeu qui s'est étoffé, une croissance assez régulière. Les joueurs étaient déjà là, le club était déjà structuré, mais il nous a amené la rigueur de l'hémisphère sud dans le travail, une façon de travailler différente, et aussi une vision du jeu nouvelle, totale, ambitieuse, avec tous les joueurs qui participent, que ce soit en attaque ou en défense. Et puis quand on travaille des trucs, et que ça marche, c'est jouissif. C'est ce qui se passe en ce moment.
A titre personnel, vous retrouvez aussi votre meilleur niveau après quelques saisons mitigées. Êtes-vous plus à l'aise avec lui ?
Il a une façon de travailler intéressante, qui me convient bien. Et puis c'est vrai aussi que lors des saisons précédentes, je jouais peut-être trop de matches, j'avais trop de temps de jeu et je n'avais pas le temps de souffler, j'avais trop de matches dans les pattes. Là il y a quand même un turnover régulier, intéressant, qui fait qu'on peut souffler, se régénérer et même bosser sur nos points faibles. Ça permet d'être quasiment à 100% toute la saison, ce que j'avais du mal à faire auparavant.
«Toulouse, une équipe mythique»
Samedi vous retrouvez Toulouse pour le choc de la saison. Comment abordez-vous cette rencontre ?
Le Stade Toulousain, c'est toujours un match à part, pour tous les joueurs. C'est une équipe mythique, un club qui survole le rugby français et européen depuis 15-20 ans. Jouer contre eux, c'est toujours particulier, en tout cas pour moi. C'est Toulouse, ils sont dans une position ultra-favorable, ils ont un jeu assez impressionnant, tout le monde se régale à les voir jouer, en championnat ou en Coupe d'Europe, ça va faire un super match, et j'espère que ça va bien se passer pour nous.
Mais Clermont est aussi devenu une référence...
Pour moi, le Stade, c'est des années au plus haut niveau, là ils sont encore en demi-finales de Coupe d'Europe, c'est quand même assez énorme. Et puis c'est un jeu offensif impressionnant, je crois que personne n'est à leur niveau en France, et c'est magnifique à voir.
Vous comptez 9 sélections avec l'équipe de France, la dernière en 2005. Vous pensez toujours au maillot bleu ?
Je ne sais pas, c'est toujours délicat. Les sélections, c'est tellement aléatoire, et je suis bien placé pour le savoir. C'est toujours un point d'interrogation. Moi ma réalité est ici, en club; c'est de faire le maximum pour aller le plus loin possible avec Clermont. Après, le reste, c'est un peu trop aléatoire, donc je me fixe pas là-dessus, je me fixe sur ce que je dois faire en club, c'est mon objectif personnel. Avant d'arrêter de jouer, je veux être champion.
Cette saison, c'est l'année ou jamais?
La route est longue, et elle est semée d'embûches. il reste encore des matches de championnat, puis après il a ces matches couperets où tout peut arriver. On le garde dans un coin de la tête ce rêve de Bouclier, mais la réalité pour l'instant, ce sont ces matches de la première phase.»
Aymeric MARCHAL - L'Equipe.fr