MUNSTER / MTG XV : ITW's

Jaouher: "Que du bonus!"

Le trois-quarts centre de Montauban, Rida Jaouher, blessé depuis le premier match du Top 14, réintègre le groupe en vue du déplacement au Munster pour lancer la campagne européenne des Tarn-et-Garonnais.

Tout d'abord, comment allez-vous?

Rida Jaouher : Très bien. Je suis très content de revenir et de réintégrer le groupe en vue de ce premier match de l'histoire européenne. J'ai eu beaucoup de mal à me défaire de l'acromio-claviculaire contractée lors du premier match face à Mont-de-Marsan et je suis d'autant plus heureux d'être là!

Débuter la Coupe d'Europe par un déplacement chez le champion en titre ne s'annonce pas simple...

R. J. : Non, mais c'est bien! Nous sommes une minorité dans le groupe à avoir connu ce niveau de la Coupe d'Europe. Je sais que nous sommes aussi attendus au tournant et que certains pensent que nous allons ramener une grosse mallette du Munster. C'est à nous de retourner le contexte et de limiter la casse, voire de rivaliser. Après tout, les Irlandais ont un jeu de mouvement qui peut nous convenir. J'ai beaucoup d'espoir en ce match.

N'avez-vous pas peur de ce saut dans l'inconnu?

R. J. : C'est l'inconnu sans l'être. Nous avons tous suivi les précédentes campagnes européennes et nous connaissons le niveau élevé de cette compétition. Et puis nous avons étudié le Munster à la vidéo. C'est une équipe complète. Ils sont solides devants, grands et gaillards. La tâche ne va pas être facile, mais nous y allons sans pression.

Montauban dispute sa première H Cup. Quel est votre objectif?

R. J. : Nous ne nous sommes pas fixé d'objectif précis. Nous ferons tout pour être les plus performants sur le terrain.

L'arbitrage en Coupe d'Europe est réputé pour être différent du Top 14 et par conséquent difficile à aborder pour les "petits nouveaux". Appréhendez-vous cet aspect de la compétition?

R. J. : Oui, nous en avons beaucoup parlé entre nous. En Top 14, nous sommes déjà l'une des équipes les plus pénalisées, surtout dans les rucks. Là, en H Cup, les arbitres sont paraît-il encore plus pointilleux même s'ils tentent de privilégier le jeu. Bref, il va nous falloir être très disciplinés pour espérer rivaliser.

Est-ce que l'environnement de Montauban (les problèmes financiers, l'attente du public, la première participation à la H Cup) exerce une pression sur vous?

R. J. : La Coupe d'Europe est inconnue du club. Mais cela reste des matchs de rugby. Nous n'avons aucune pression, bien au contraire.

Etre le petit nouveau de la compétition ne vous effraie pas donc?

R. J.: Il faut rester lucide. Nous ne sommes pas dans la même cour. Le Munster est le champion d'Europe en titre, il inaugure un nouveau stade... Mais cela reste du rugby et tout est jouable.

Vous êtes dixièmes du Top 14 avec trois défaites sur les quatre derniers matchs. Allez-vous vous servir de la Coupe d'Europe pour rebondir en championnat ?

R. J. : C'est vrai que les défaites à Montpellier et face à Toulouse nous ont fait beaucoup de mal au moral. Nous voulons essayer de poursuivre dans la dynamique entamée face au Stade français. Nous avons produit de bonnes choses en première période. Nous avons créé du mouvement et la Coupe d'Europe nous le permet plus qu'en Top 14. Il faudra se servir de la H Cup pour trouver nos repères et progresser dans notre rugby.

Finalement cette Coupe d'Europe, c'est du tout bonus non?

R. J.: Exactement! Inaugurer un nouveau stade, affronter le champion d'Europe en titre... Ce n'est que du bonus. Nous savons ce qui nous attend, mais comptez sur nous pour relever le défi.

Laurent Labit, entraîneur de Montauban affronte ce week-end le Munster lors du 1er tour de HCup et pour le premier match de son équipe en Coupe d'Europe. L'occasion pour les Montalbanais de se tester au plus haut-niveau.

- Vous allez affronter le Munster, deux fois champion d'Europe. Qu'avez-vous changé dans la préparation en vue de cette rencontre?

On a travaillé sur la préparation physique de manière plus intense. La préparation de début de saison a été plus dure car nous avons un mois d'octobre très dense. Notre début de championnat en a souffert mais notre volonté est de bien figurer en HCup. Nous ne venons pas faire de la figuration. L'intensité des matchs de Coupe d'Europe est totalement différente de celle en TOP 14 et l'approche des rencontres est autre aussi car le seul danger existant est de ne pas être qualifié pour la suite. En TOP 14, le danger est de perdre des points en vue du maintien. Il y a la pression de la descente en division inférieure. Cela fait 15 jours que nous préparons le match du Munster. Nous avons commencé la semaine du match contre le Stade Français Paris qui nous offrait une intensité digne d'une rencontre européenne. On a ainsi beaucoup plus travaillé sur le jeu, sur les rythmes et les déplacements. En HCup, il faut tenir plus longtemps...

- On dit que disputer la HCup est une nouveauté pour les joueurs, les supporters et les dirigeants mais pour les entraîneurs aussi cela doit changer des choses?

Tout à fait! Voir d'autres schémas de jeu, ça ouvre sur autre chose. Sur une remise en cause et la nécessité d'avoir une autre approche d'une compétition. Laurent Travers (le second entraîneur de Montauban, NLDR) et moi-même sommes de jeunes entraîneurs. C'est un nouvel apprentissage qui va nous faire progresser.

- Le Munster est une équipe que vous connaissez bien puisque vous les avez affronté en 1995 avec Castres (victoire 19-12) puis avec Colomiers (défaites 31-15 et 23-5) en 1999-2000. Leur fond de jeu a t-il radicalement changé en 10 ans?

En 1995 avec Castres, nous les avions effectivement battus et je garde de bons souvenirs des ces trois rencontres en tant que joueurs. Désormais le Munster c'est autre chose. Certes ils ont conservé ce gros jeu d'avants qu'ils avaient déjà en 1995, mais aujourd'hui ils ont des 3/4 qui allient puissance et vitesse; des centres avec des appuis terribles; la charnière de l'équipe d'Irlande et un jeu porté sur des séquences longues et les larguers du terrain. Ils sont bien plus complets qu'à mon époque!

- L'entraîneur n'a t-il pas la crainte de la blessure avec la HCup?

C'est sûr que c'est un risque mais c'est aussi pour cette raison que nous avons un peu cafouillé et tâtonné en début de saison. Nous voulions débuter la HCup avec un effectif maximum afin d'avoir une équipe cohérente. Donc nous avons fait tourné au maximum. Le but du jeu est de retirer quelque chose de ces matchs de haut-niveau. Si chacun de nos joueurs progresse de 10 ou 15% ce sera très bien pour la suite du championnat.

Spécialiste de la défense au Munster, Tony McGahan a pris la succession de Declan Kidney à la tête de l’équipe première, l’été dernier. L’Australien, arrivé en 2006, attaque les choses sérieuses dès vendredi.

Tony McGahan a pris du galon. Spécialiste de la défense la saison dernière, l’Australien a pris la succession de Declan Kidney cet été. Après le départ de son mentor vers l’équipe d’Irlande, le nouvel homme fort des champions d’Europe en titre a peu à peu pris ses marques pour habiter pleinement son nouveau costume de patron. Non sans une certaine fierté. « J’ai commencé à travailler à Munster en février 2006, rappelle-t-il, mais mes fonctions ont varié au fil du temps ce qui représentait un défi différent à chaque fois et l’an passé mon poste était strictement basé sur l’entraînement pur. Maintenant, je suis toujours sur le terrain mais j’ai également d’autres responsabilités, qui consistent notamment à veiller au bien-être des joueurs, au mode de communication et à régler un tas d’autres situations du quotidien. »

Un quotidien qui s’annonce forcément de plus en plus chargé avec l’ouverture de la H Cup vendredi. Placés dans la poule 1, le groupe de la mort selon la plupart des observateurs, avec les Anglais de Sale, Clermont et Montauban, les Irlandais se savent attendus. Et ce dès vendredi contre les Montalbanais dans un Thomond Park rénové. « L’histoire a montré qu’il est plus difficile de défendre la H Cup que de la remporter au départ et jusqu’ici seule l’équipe de Leicester est parvenue à enchaîner deux victoires de suite, souligne un McGahan prudent. Une fois de plus nous nous trouvons dans une poule difficile et nous allons procéder par étape. Nous allons répartir les rencontres en trois blocs de deux matchs chacune puis les décomposer en abordant un match à la fois et prévoir notre préparation match par match. »

Victorieux du Stade Toulousain (16-13) à Cardiff avec un jeu aussi efficace qu’ennuyeux le 24 mai dernier, le Munster version McGahan pourrait développer un jeu différent. Plus audacieux si l’on en croit l’ancien coach de l'équipe d'Australie A et des Brisbane Bronco. « Pour ce qui est de la manière selon laquelle je voudrais que mon équipe aborde le match, alors que je plutôt fervent défenseur d’un rugby créatif et d’un jeu positif, j’aimerais aussi que mon équipe soit en mesure de prendre en considération les conditions pertinentes et les forces de nos adversaires », dit-il. Savoir s’adapter et changer de stratégie en cours de match, c’est le rêve de n’importe quel entraîneur.

Pour le moment, la méthode a payé. Premier de la ligue celtique avec 22 points en cinq journées avec un dernier succès contre Glasgow (25-17) le week-end dernier, le Munster monte peu à peu en puissance. Au meilleur moment.

MTG XV. Laurent Delboulbes : des étoiles plein les yeux

. Le jeune pilier du MTG XV n'oubliera pas de sitôt son premier match en Heineken Cup.



« ça n'a absolument rien à voir avec un match de Top 14, ça va beaucoup plus vite».Photo AFP.Au moment de quitter enfin le lounge de l'aéroport de Shannon à une portée de drop-goal de Limerick (le départ initial de l'avion affrété par le MTG XV pour ce déplacement avait été décalé de plusieurs heures, si bien que le groupe n'arriva que samedi à 7 h 30 à Blagnac), Karim Ghézal se retourna vers le jeune pilier « Lolo » Delboulbes. Et lui tint à peu près ce langage : « Dans quelques saisons, lorsque tu seras devenu le recordman des joueurs du MTG XV ayant disputé le plus de matchs en Heineken Cup, j'espère bien que tu te rappelleras de celui-là et des copains qui se trouvaient autour de toi à ce moment-là. »

Laurent Delboulbes, à l'écoute de ces propos, a libéré un large sourire et s'est retourné vers son équipier de deuxième ligne, des étoiles plein les yeux, pour lui rétorquer sereinement : « J'ai déjà obtenu une belle part de bonheur ce soir. »

Au-delà du résultat (beaucoup auraient signé pour une défaite de deux points face au club champion d'Europe), celui qui se désole d'entendre les speakers britanniques ne pas parvenir à prononcer son nom correctement, « déjà qu'en France, ce n'est pas toujours ça », n'avait de cesse de mettre en avant l'état d'esprit déployé par tous les joueurs pour prouver que leur place à ce haut niveau du rugby européen était bien loin d'être usurpée.

« ÇA VA BEAUCOUP PLUS VITE QU'EN TOP 14 »

Le jeune pilier gauche tarn-et-garonnais qui était venu au relais de l'exemplaire Bogdan Balan (il s'est cogné le géant John Hayes durant plus d'une heure sans broncher) lors du deuxième acte se faisait un plaisir à souligner encore et encore qu'« à moins de trois minutes du coup de sifflet final, le MTG avait quasiment signé un exploit ».Pour le reste « Lolo » n'était guère en peine pour livrer une synthèse des événements qui avaient valu aux équipiers de Marc Raynaud de quitter la pelouse du Thomond Park Stadium sous les applaudissements de milliers de supporters irlandais. Et avec un capital respect, écorné par certains avant le match, qui venait de prendre une belle dose de plus-value d'un seul coup. « ça n'a absolument rien à voir avec un match de top 14, relevait encore Laurent Delboulbes, ça va beaucoup plus vite, c'est très intéressant à disputer parce que l'arbitre laisse jouer et de ce fait, les temps de jeu prennent plus de volume d'un côté comme de l'aurtre. » Quelques instants de réflexion et il prolongeait ainsi son analyse : « En face, il y avait une formation de très gros calibre. Une opposition que l'on rencontre à deux ou trois reprises dans une saison, guère plus. C'était du très gros calibre. Sur un match comme ça, on ne peut que progresser. Physiquement, c'était très lourd avec ces Irlandais qui arrivent très, très vite sur les points chauds. Nous avons réussi à bien les presser en défense et à les faire douter. C 'est cette solidarité défensive de chaque instant qui nous fait tenir et qui nous permet d'avoir le gain du match à notre portée. Nous avons beaucoup communiqué entre nous pour éviter de nous faire percer défensivement et cela a très bien fonctionné ». Paul O'Connell et ses copains du Munster peuvent toujours en témoigner…l

Jean-Philippe Laulan

Travers: "Choqué et énervé !"

Il aura manqué deux minutes à Montauban pour réaliser dès ses premiers pas en Coupe d'Europe l'exploit de cette édition en allant s'imposer sur le terrain du Munster champion d'Europe. Défait (19-17) sur une pénalité de l'inévitable O'Gara, le MTG XV, à l'image de son entraîneur, Laurent Travers, n'a guère apprécié d'être soupçonné de lâcher cette première expérience européenne en alignant de supposées doublures en Irlande.

Laurent, on devine chez vous deux sentiments après cette courte défaite (19-17) au Munster, à la fois la fierté à l'égard de la performance de vos joueurs et la déception d'être passé si près de l'exploit...
Tout à fait. La fierté parce qu'ils ont montré qu'ils avaient une grosse solidarité et beaucoup d'enthousiasme, qu'ils n'avaient qu'une envie, celle de montrer qu'ils avaient leur place dans cette Coupe d'Europe. Après, un peu de déception aussi parce que lorsqu'on mène à deux minutes de la fin, vous menez chez le Champion d'Europe voire l'équipe d'Irlande, ça prouve la performance et l'exploit qui aurait pu être réalisé. Mais ce n'est aussi qu'un match, ça prouve la qualité des joueurs mais il ne faut pas oublier qu'il reste encore cinq matches très difficiles. Et ce n'est pas parce que ça a souri aujourd'hui que ça nous sourira demain encore. On n'oublie pas qu'il y a trois semaines, contre Toulouse (défaite 10-41), on était bon à jeter aux orties et qu'aujourd'hui, tout le monde nous monte en haut. On vit un équilibre et on connaît notre place. On sait qu'on est capable de réaliser des exploits et d'aller chercher au fon de nous des ressources que certains ne soupçonnaient pas.

Est-ce que cette Coupe d'Europe n'est pas une belle occasion pour Montauban de s'émanciper d'un parcours en Top 14 délicat et d'un contexte local actuellement trop pesant ?
Complètement, ce n'est pas facile. Jusqu'à présent, les joueurs essayaient de faire abstraction de tout ce qui peut se passer autour. Mais il ne faut pas oublier que ce n'est plus le rugby d'il y a dix ans, où ils étaient plus réactifs. Aujourd'hui, c'est leur métier, ils ont comme tout le monde des enfants, des familles, des emprunts, et il est normal qu'ils se soucient de l'avenir du club sur le plan financier. C'est comme un ouvrier dans une entreprise qui sent que celle-ci ballotte. Là, c'est exactement la même situation. Et pour nous, entraîneurs, c'est encore plus difficile à gérer entre les joueurs en fin de contrat, qui imaginent déjà leur avenir ailleurs, et d'autres, sous contrat, qui sont en position de s'interroger sur ce qu'ils vont faire et sur ce qui va se passer. Il faut trouver la place pour pouvoir parler du sportif. Cette Coupe d'Europe, à partir de là, et même s'il ne s'agit en aucun cas de se trouver des excuses, permet aux joueurs d'oublier ce contexte. Ce qui faisait la force de Montauban, c'était la sérénité, la solidarité et l'état d'esprit, autant de valeurs qui étaient absentes depuis quelques temps. Cette bouffée d'oxygène, il faut en faire notre fond de commerce.

"Jouer sur notre image et celle du rugby français..."

Vous affrontez Clermont dès la semaine prochaine à Sapiac pour le compte de la 2e journée : les Clermontois sont prévenus...
Ça va être encore plus dur parce qu'en ayant pris un point au Munster, les autres équipes ont plutôt intérêt à faire ce qu'il faut contre nous afin de prendre de l'avance par rapport au Munster. En fait, on va jouer les arbitres dans cette poule. Les autres équipes sont prévenues mais elles se doivent désormais de prendre plus de points que le Munster.

Rétrospectivement, avoir vu certains journaux qualifier votre équipe alignée au Munster d'équipe-bis ou encore que Montauban lâchait ce match, ça vous inspire quoi ?
L'ensemble du groupe et nous, les entraîneurs, avons été très choqués et très énervés par les propos qui ont pu être tenus. Pourquoi ? Parce que c'est jouer sur notre image et supposer que nous pourrions être capables de lâcher, ce qui n'est certainement pas notre façon de faire. L'image du club mais aussi celle du rugby français en général parce que ça voulait dire que le septième du rugby français se qualifie mais lâche tout. Or, il était hors de question de donner cette image du rugby français en Coupe d'Europe. C'était aussi faire injure à l'ensemble des joueurs.

On vous sent particulièrement remonté...
En ce qui nous concerne, on sait très bien que la plupart des clubs qui participent à cette compétition utilisent 45 joueurs. Nous, à Montauban, n'en avons que 36. Notre but était de jouer avec les 36 pour que tout le monde se sente concerné du début jusqu'à la fin, que ce soit en Top 14 ou en H-Cup ; et qu'on ne peut pas se permettre pour tout entraîneur ou tout joueur qui connaît le milieu, quand on a déjà fait sept matches de championnat, et que la plupart les ont disputés en intégralité, en sachant que vous allez au Munster, champion d'Europe, et que derrière vous recevez Montferrand et que vous vous déplacez ensuite à Montferrand, il faut bien trouver un moment pour reposer et faire en sorte que tous soient concernés. Parler d'équipe-bis, c'est donc faire injure aux joueurs qui étaient présents sur le terrain, aux entraîneurs qui avaient fait des choix et ne pas respecter et ne pas comprendre ce qu'est le haut niveau. Quand on voit Toulouse annoncer qu'après deux matches de Coupe d'Europe, ils seront obligés de faire tourner pour le match du Stade Français et quand on connaît l'effectif des Toulousains, alors que peut-on dire ici à Montauban ?