Neuf saisons passées sous le maillot clermontois marque un homme. Philippe Saint-André, dit "le Goret" depuis sa carrière à Montferrand, dont il porta fièrement le brassard de capitaine, sera de retour samedi, à Marcel-Michelin, pour l'ouverture de la H-Cup. A la tête d'une équipe de Sale, devenue une référence outre-Manche, l'ancien capitaine du XV de France ne cache pas sa fierté.
Philippe, Sale réalise un très bon début de saison (*) et semble, après une saison gâchée par la Coupe du monde, avec l'absence de ses internationaux, avoir retrouvé de hautes ambitions...
Pour ce qui est de cette Coupe d'Europe, je ne pense pas que l'on soit favori dans ce groupe avec le Munster, qui est le favori de cette compétition, et Clermont, qui est une très belle équipe. On est, disons, l'un des outsiders et on va se déplacer à Clermont-Ferrand avec des ambitions, pour essayer d'y produire un vrai match de rugby, de jouer et d'être conquérant. Après, on sait que ça n'est jamais facile d'évoluer à Marcel-Michelin face à une équipe bien équilibrée et qui marche bien. On est content d'être en Coupe d'Europe et de cette perspective d'affronter deux des plus belles équipes européennes. On joue cette épreuve pour disputer ces matches-là et on va essayer d'y mettre tous les ingrédients pour être à la hauteur de l'événement. J'ai joué neuf saisons à Clermont-Ferrand. Il faudra vraiment qu'on soit à 100-120 % de nos capacités parce que lorsque tu joues à Marcel-Michelin, dès que tu commences à rater quelques plaquages et à commettre des erreurs, tu es puni. C'est à nous de faire un match de haut niveau samedi en France.
Quelle importance accordez-vous au record défensif établi par vos Sharks en ce début de saison. Est-ce l'expression d'une exigence particulière de votre part par rapport à vos joueurs ?
Au cours des quatre premiers matches, on n'avait pas concédé d'essais et la semaine dernière aux Irish, on en a pris quatre sur une seule rencontre. Ça s'équilibre donc, d'autant plus que je compte depuis trois blessés graves (Bruno, Cox et Ripoll qui sont indisponibles entre trois et cinq mois, ndlr). Au rugby, l'équilibre, c'est toujours le prochain match. Maintenant, on effectue, c'est vrai, un bon début de saison en Premiership avec cinq matches, quatre victoires dont deux à l'extérieur. Mais c'est un championnat difficile
"Clermont est un beau club de rugby"
Au-delà de la succession du Munster, le coup d'envoi de cette nouvelle H-Cup va aussi valoir pour l'arbitrage et sa cohérence. En France, l'application des nouvelles règles fait débat. Qu'en est-il en Angleterre depuis le début de cette saison ?
C'est à peu près pareil et très irrégulier en fonction des arbitres. Apparemment, ils ont eu des directives différentes depuis quinze jours, c'est pour ça qu'il y a beaucoup plus d'essais. On va voir maintenant comment ça va se passer en Heineken Cup. Il va falloir s'adapter rapidement.
Vous évoquiez l'hiver dernier, sur Sports.fr, Clermont comme étant devenu l'autre référence en matière de jeu au côté des Toulousains. Maintenez-vous ce jugement ?
On ne dispute pas deux finales de championnat d'affilée en étant chanceux, c'est tout sauf le fruit du hasard. La saison dernière, les Clermontois ont fini en tête de la saison régulière avec pas mal de points d'avance sur tout le monde (5 points d'avance sur Toulouse, ndlr). Après, ils sont tombés sur des Toulousains euphoriques en finale mais ça reste une belle équipe, un bon système de jeu et une formation qui joue, qui n'a pas peur de prendre des risques et d'imposer son jeu. En plus, c'est un club qui a bien évolué, qui s'est structuré à tous les niveaux et possède toujours des supporters exceptionnels. Donc c'est un beau club de rugby. A Clermont-Ferrand, il ne leur manque qu'une chose, ce titre de champion de France et j'espère vraiment pour eux qu'ils l'auront un jour. Pour celui de Champion d'Europe, s'ils peuvent attendre un an ou deux, ce serait bien, ça signifierait qu'on a eu de bons résultats contre eux d'ici là (rires).
Clermont compte neuf finales de championnat pour autant de défaites, alors que Sale a remporté le titre de Champion d'Angleterre dès sa première finale en 2006. Que manque-t-il selon encore à Clermont ?
Pratiquement rien parce que je pense qu'ils ont tout, les hommes, les structures, l'effectif... Nous, à Sale, on a vécu, c'est vrai, deux ans exceptionnels parce que pour la première finale, on met 40 points à Leicester. Cette saison avait été exceptionnelle, mais le problème de Sale, c'est qu'on ne possède pas la richesse d'effectif d'équipes comme Clermont, Toulouse, le Stade Français ou Leicester. Moi, j'ai 31 pros mais avec mes trois blessés graves, mon effectif est réduit à 28 joueurs pros. On est un club qui essaye de « challenger » les ténors. Mais à Manchester (Sale se situe dans la banlieue de la ville, ndlr), c'est une ville football, on n'a pas le socle supporters-sponsors que peuvent avoir des clubs comme Montferrand mais on tente de se battre dans ce monde-là avec nos forces et nos moyens.
Ne manque-t-il pas alors à Clermont un Philippe Saint-André sur le banc ?
Non, très franchement, je pense que Vern Cotter réalise un boulot exceptionnel au côté de Jean-Marc Lhermet, le manager, avec lequel j'ai eu la chance de jouer. Et si Cotter a resigné pour deux ans, c'est bien que les dirigeants sont conscients de l'énorme travail réalisé et du système de jeu mis en place. A Clermont, les gens sont fidèles et il est tout à fait justifié que Vern Cotter puisse continuer ce qu'il a entrepris depuis deux ans.
Ce n'est pas la première fois que vous revenez jouer en France avec Sale en H-Cup. Ça ne s'est pas toujours très bien passé (3 victoires en 13 matches face aux équipes françaises). Ce retour à Clermont possède-t-il pour vous une saveur particulière ?
On avait perdu, c'est vrai, au Parc des Princes, face au Stade Français, ça avait été un match exceptionnel. On les avait pris une semaine plus tard à domicile. C'est toujours très difficile de jouer en France, mais il est aussi difficile de venir jouer à Sale (rires). Personnellement, quand on entraîne une équipe, on a envie qu'elle gagne. J'ai surtout envie d'être fier de mon équipe samedi, qu'elle réalise un match de grande qualité. Si Clermont est meilleur et doit gagner, pas de problèmes mais je veux surtout qu'on réalise un match plein et qu'on donne tout pendant 85 minutes.
(*) Leader après quatre journées, Sale a connu sa première défaite (6-28) de la saison la semaine dernière sur le terrain des London Irish, y concédant surtout quatre essais, les premiers de l'exercice. Appuyés jusqu'à ce match sur une défense impressionnante, les Sharks sont devenus la première formation en onze ans de championnat anglais à enchaîner quatre matches sans concéder le moindre essai.
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