Où va Bourgoin?
L'avenir de Bourgoin au plus haut niveau s'inscrit-il en pointillés? La question se pose après le départ annoncé de Julien Bonnaire. Le club isérois ne peut empêcher cette fuite des cerveaux. Et comme le projet de fusion avec Lyon semble enterré, le CSBJ aura du mal à tenir la distance.
Il y a quelque chose d'inexorable dans le retour dans le rang opéré bien malgré lui par le CS Bourgoin-Jallieu. Pas une brusque descente aux enfers, non. Juste un lent mais progressif décrochage. Depuis deux ans, date de leur dernière participation aux demi-finales du Top 14, les Ciel et Grenat voient s'éloigner, doucement mais sûrement, les grosses machines que sont Biarritz, Paris, Toulouse, ou Perpignan. Même Clermont a pris place dans ce groupe de cadors, et se donne les moyens d'y rester. A ce titre, le départ annoncé de Julien Bonnaire, en fin de saison, pour le club auvergnat, est le plus marquant des symboles.
En juin, le CSBJ perdra donc un nouvel international. Bonnaire emprunte le même chemin que Sébastien Chabal, Lionel Nallet et Pascal Papé avant lui. D'autres suivront sans doute à terme. Comme ses compères, le troisième ligne centre international part à regrets. Mais à 28 ans, il n'avait plus le choix. "Je ne sens pas le CSBJ capable de m'offrir un projet sportif ambitieux à moyen terme, explique-t-il dans les colonnes du Progrès. Le club n'a pas su évoluer au niveau de ses structures. C'est dommage, car on possédait vraiment un sacré potentiel."
Sur les 22 joueurs réunis à Marcoussis cette semaine pour préparer la rencontre face à l'Italie, six ont joué ou jouent à Bourgoin: Bonnaire, Nallet, Milloud, Fritz Chabal et Papé. Sans oublier Benjamin Boyet, actuellement blessé, mais retenu dans le groupe des 40 pour le Tournoi. Le sentiment de gâchis est bien là. Bourgoin, qui n'a pas su négocier le tournant décisif des deux-trois dernières saisons, est en passe de manquer le bon wagon. Il sera peut-être trop tard, ensuite, pour le rattraper.
Martinet résigné
Désolé de la tournure de la situation, Pierre Martinet estime pourtant ne pas pouvoir faire autrement. "Le départ de Julien me touche profondément. Il avait vraiment envie de rester. Mais je n'ai plus les moyens de le retenir. Je l'ai toujours tenu au courant de la situation du CSBJ, car je ne voulais pas brider sa carrière", confie le président berjallien, presque résigné. A terme, un garçon, comme Benjamin Boyet risque fort de suivre l'exemple de ses camarades internationaux. Personne ne lui en voudra, pas même ses dirigeants.
Bonnaire l'a bien expliqué, c'est surtout le flou sur l'avenir du club qui l'a poussé à faire ses valises. Seul, Bourgoin ne possède pas la puissance économique d'une ville comme Toulouse, Clermont ou, évidemment, Paris. D'où l'idée de s'unir avec Lyon, un peu comme Orthez avait su le faire en basket dans les années 80 avec Pau. Mais le projet a du plomb dans l'aile. Dans l'édition de lundi de Midi Olympique, Martinet a même annoncé que, pour l'heure, la fusion avec le LOU ne verrait pas le jour. "On se bat contre des montagnes, soupire le dirigeant isérois. La pression des politiques est trop forte pour que ce projet aille à son terme. A mon grand regret, on ne va pas aller plus loin."
Mieux ficelé, dans un climat plus serein, le projet reviendra peut-être sur la table. C'est sans doute la seule façon pour Bourgoin d'espérer se maintenir au top. Sinon, dans dix ans, et même avant, il est à craindre que le CSBJ ne devienne un chef d'oeuvre en péril, engendrant chez ses supporters, si fervents, si nombreux, davantage de nostalgie douce amère que de perspectives d'avenir.