Après trois ans et demi d'absence, Benoît Baby retrouvera le XV de France samedi, face à l'Argentine. Entre ses 3e et 4e sélections, beaucoup de choses ont changé dans la carrière de l'ancien Toulousain, qui a connu bien des déboires avant de rebondir.
Baby, comeback. Plus de trois années se sont écoulées depuis la dernière sélection de Benoît Baby en équipe de France. "Je m'en souviens parfaitement. C'était lors de la tournée de juin 2005, en Australie", sourit l'intéressé. C'était l'époque de la jeunesse insouciante et des belles promesses. Baby incarnait la nouvelle vague toulousaine et la génération 2007, celle qui devait conquérir la Coupe du monde. La Coupe du monde? Baby l'a suivie chez lui, devant sa télé. Entre 2005 et 2008, il a connu une véritable traversée de désert. Toute une vie entre trois ans. Des blessures, des galères, des doutes, du dégoût. L'envie de tout balancer. Le désespoir. Puis il s'est relevé. Tout doucement. Jusqu'à revenir ici, à Marcoussis.
Benoît Baby aurait pu ne jamais reprendre le fil de sa carrière internationale. Au printemps 2007, après quasiment deux saisons blanches à Toulouse, il touche le fond. "J'ai pensé tout foutre en l'air, avoue-t-il. Je me suis posé beaucoup de questions Je me suis dit que j'étais tellement ridicule que je devrais peut-être arrêter ma sa carrière. Je n'arrivais pas à revenir. J'avais des douleurs dans les jambes dès que je forçais un peu." Le joueur souffre, et l'homme déprime. "J'étais dans une spirale négative. Rien n'allait. Je voyais tout en noir. Le moindre truc prenait des proportions catastrophiques. Je m'engueulais avec ma femme, je commençais à détester ma famille. Il fallait que je sorte de cette merde."
"J'ai une vie plus saine"
Le bout du tunnel, il va l'entrevoir à Clermont. La main tendue par le club auvergnat lui permet peu à peu de redevenir un joueur. "Je dois beaucoup à ce club, assure l'Ariégeois. D'abord au staff médical, qui a décelé tout de suite d'où venaient mes problèmes, ce que le staff toulousain n'avait pas su faire. Et je peux aussi dire merci à Vern Cotter." Dès le début de la saison, l'entraineur néo-zélandais de l'ASM lui offre du temps de jeu. Il se montre patient et lorsque Floch est appelé chez les Bleus pour le Tournoi l'hiver dernier, Baby tient sa rédemption, au poste d'arrière. On redécouvre un joueur qu'on avait perdu de vue.
En quittant les bords de la Garonne pour les contreforts du Massif Central, Baby n'a pas seulement changé de club. Il a changé de vie. Un virage à 180° salvateur. "Aujourd'hui, explique-t-il, j'ai une vie plus saine. J'avais un côté fêtard, mais je me suis bien calmé. Je ne bois plus. Je me couche à 22h30 alors qu'avant je ne me couchais jamais avant minuit. J'essaie aussi de faire un peu attention à mon alimentation, mais sans plus. Il faut quand même se faire plaisir dans la vie!" L'homme se livre en toute sincérité. On le sent apaisé. Parce qu'il est désormais pleinement tourné vers l'avenir, il peut évoquer sans peur, et sans reproche, les douleurs du passé.
Le symbole de Dublin
Y compris celles qui concernent l'équipe de France. Son baptême du feu, à Lansdowne Road, lors du Tournoi 2005, chez les Bleus demeure inoubliable. En Irlande, il marque un essai somptueux et refuse de baisser les yeux devant la star mondiale Brian O'Driscoll, mais son bilan est terni par son coup de tête sur le capitaine irlandais. "J'avais été très fier de gagner à Dublin avec cette équipe. Ca reste un très bon souvenir, assure BB. Même si aujourd'hui, on me parle plus de mon coup de boule que de mon essai. Ce coup de boule, il me poursuit encore. Mais c'était une erreur de jeunesse. C'est du passé. Je sais ce que j'ai à faire pour ne pas rééditer ce genre de bêtise." Finalement, ce match apparait avec le recul comme un condensé de sa première moitié de carrière, où le meilleur a côtoyé le pire.
Performant dans son club, Benoît Baby se voit logiquement offrir une nouvelle chance au plus haut niveau. Sans voir plus loin que ce match face à l'Argentine. "Est-ce que je dois accrocher le bon wagon?, s'interroge le centre clermontois. Mais il n'y a pas de wagon. Si je suis bon, je reviendrai. Si je suis nul, je dégage et il n'y aura rien à dire. Le groupe France, ce ne sont pas 23 joueurs mais 40 ou 50. Alors, un wagon... A moi d'être bon, c'est tout." Ainsi va la vie selon Benoît Baby. Elle n'a jamais été aussi simple et aussi belle.
Rugbyrama - Laurent VERGNE